Innovation : transformer l’eau en feu ?
La société de Nicolas Jérez, installée près de Montpellier, a mis au point une technologie révolutionnaire qui transforme l’eau en feu !
« Oui, mes amis, je crois que l’eau sera un jour employée comme combustible, que l’hydrogène et l’oxygène, qui la constituent, utilisés isolément ou simultanément, fourniront une source de chaleur et de lumière inépuisables et d’une intensité que la houille ne saurait avoir. » Ainsi pensait Jules Verne dans son fantastique récit de l’Ile mystérieuse. 150 ans plus tard, dans l’Hérault, la réalité a dépassé la fiction. La société Bulane, dirigée par Nicolas Jérez a inventé un process de brasage sans danger pour l’homme et l’environnement : l’eau comme combustible. Avec, à la clé, une flamme hydrogène de 2 800°C sans carbone ni bouteille de gaz.
Pas de combustibles fossiles et polluants
Depuis douze ans, le jeune ingénieur, originaire de Lyon, travaille sur la séparation par électrolyse de l’hydrogène et de l’oxygène, les deux éléments qui composent l’eau.
Installé sur l’Ecoparc de Fabrègues, près de Montpellier, Bulane, du nom d’une évanescente déesse, conçoit et commercialise depuis six ans des générateurs fonctionnant à l’eau et à l’électricité et servant au brasage. Ces postes à brasage nouvelle génération nommés dyomix diffusent une flamme propre. Et c’est là toute la différence ! Fini les soudures à base de combustibles fossiles, et donc polluants. « Cette technologie innovante permet de produire sur site et sans stockage un gaz qui ne dégage pas de CO2 lors de sa combustion », explique Nicolas Jérez, ingénieur TIC et ancien élève de l’Epsi à Montpellier. De quoi répondre aux exigences des industriels au premier rang desquels, Lennox, Atlantic, Thales Carrier, Continental ou encore De Dietrich.
De l’eau et une prise électrique
C’est en 2009, après plusieurs années de recherches liées au développement du process, en partenariat avec l’École des mines d’Alès et Polytech à Montpellier, que Nicolas Jérez décide de créer sa société. « Le lancement commercial de la gamme de générateurs dyomix s’est fait en 2013 après plus de 80 000 heures d’essais et d’analyses. »
Comment fonctionne ce système ? Une électrolyse de l’eau permet de séparer l’hydrogène et l’oxygène. Ensuite, ces deux gaz filtrés et traités seront réunifiés afin d’obtenir une combustion. « Ce procédé permet de supprimer tous les risques liés au stockage et au transport de gaz, puisqu’il suffit juste d’avoir de l’eau et une prise électrique pour faire fonctionner le poste à brasage, assure Nicolas Jérez. Par conséquent, les entreprises simplifient leurs contraintes logistiques et réalisent de véritables économies. »
Des levées de fonds pour se développer
Afin de mieux répondre aux attentes des industriels, cette invention a été pensée et développée avec eux. Les recherches ont été partagées avec près d’une cinquantaine de partenaires techniques et scientifiques dont le CNRS ICGM et l’Institut CARNOT Pôle Chimie Bâlard.
Forte d’une douzaine de collaborateurs, l’enseigne est aujourd’hui présente dans 10 pays d’Europe, en Russie, aux USA et eu Mexique. « Nous ciblons des marchés car ils sont très dynamiques sur le plan industriel, notamment parce qu’ils concentrent de nombreux fabricants de climatiseurs ou de pompes à chaleur », confie le jeune dirigeant.
En 2015, la première levée de fonds de 2,7 M€ a permis à la PME de développer des appareils mobiles haut de gamme « pesant seulement 35 kg » destinés aux frigoristes et chauffagistes. L’automne dernier, Bulane a bouclé un nouveau tour de table de 2,8 M€ pour soutenir sa forte croissance (+95% en 2018) et avec un nouvel objectif : développer de nouvelles gammes de machines et investir à l’international.
Entre-temps, l’entreprise héraultaise a conclu un accord de distribution avec la société Castolin, géant européen des matériels de soudage et brasage. Cette filiale du groupe gazier international Messer commercialise en Europe les stations de brasage mobile utilisant la technologie dyomix.
Construire l’après pétrole
Côté reconnaissance, Bulane a souvent raflé la mise de l’innovation. En novembre 2015, la PME héraultaise a remporté le concours Clean tech lancé par Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie. Un an plus tard, elle a décroché le prix Occinov décerné par le Groupe Dépêche.
De leur côté, les professionnels du bâtiment lui ont octroyé une médaille d’or lors du concours de l’innovation 2017. En 2018, Bulane est notamment distinguée du Trophée RSE 2018 pour son partenariat avec APF Entreprises 34 ainsi que du Start’Up Trophy Innovation Banque Populaire du Sud 2018.
Autant de récompenses qui démontrent la volonté affirmée de Bulane de participer à la transition énergétique et de tenter de construire le monde de l’après pétrole. Traduire : le Monde Nouveau !
PH. P. ET G.L.