Le manifeste du monde nouveau
Durant le forum Le monde nouveau, les étudiants de l’UPVD, l’université de Perpignan, et de Sciences Po Toulouse, ont rédigé le manifeste du forum, texte révélateur et porteur. Il a notamment été lu et remit en présence de Michal Kurtyka, le président de la Cop 24.
La dernière de toutes nos chances.
Nous vivons notre suicide, tout nous crève, se consume, s’écroule, s’écoule, s’accélère, s’épuise et s’achève, dans nos bras et nos yeux à semi-ouverts ; se ralentit le pouls de la Terre. Effondrement de la biodiversité, explosion de la pollution atmosphérique, effilement des liens sociaux, réchauffement cataclysmique des océans, financiarisation croissante des individus, propagation de nouvelles maladies, exploitations des or noir or bleu or jaune ou or rouge, marchandisation de l’espace du temps et des bêtes. Le grand coeur s’arrête et plus rien ne bat. Il y a de ces tragédies irréversibles. Et notre sang était pourtant leur sève.
Mais nous sommes révolte. Notre colère est motrice et déterminée. On ne désire pas de ce monde, un monde dont le visage a été dessiné à l’acide. Sacriferiez-vous sur l’autel de la croissance économique, tout ce que nous sommes ? Ne voulez-vous pas un monde qui garantit dignité à tout être vivant ? Alors redonnons à ce monde une musicalité, une résonance et de nouvelles pulsations. En un mot : Osons. Osons sortir du cercle et démultiplier les champs des possibles. Comprenons que la solution c’est nous et que le monde ne deviendra nouveau, résilient, collectif, local, humain, innovant, responsable et audacieux que lorsque nous-mêmes nous le serons devenus. C’est qu’on ne veut pas vieillir avec des regrets mais verdir avec des espoirs.
Soyons RÉSILIENT.E.S. L’effondrement de la société est inévitable. Si nous voulons survivre ; faire face aux changements massifs qui vont transformer le monde : nous devons nous adapter. Nous devons restructurer nos modes de vie pour construire une économie régénérative et respectueuse du vivant. Une société résiliente pour nous permettre de nous relever et de surmonter les défis d’aujourd’hui.
Soyons COLLECTIF.VE.S. Remettons le lien social au coeur de notre vie de travail, de notre vie domestique, de notre quotidien. Chaque être humain.e regorge de potentiels et de talents : réunissons nos forces pour créer une société basée sur l’entraide et la solidarité. Laissons les un.e.s devenir l’oxygène des autres, mutualisons nos espoirs et nos idées. Notre monde sera d’autant plus beau et doux qu’il sera communautaire.
Soyons LOCAUX.ALES. Coordonnons toutes les échelles à partir de nos territoires si riches de solutions. Aujourd’hui, notre modèle économique énergivore et globalisé dicte nos manières de vivre, mais demain, l’autosuffisance énergétique et alimentaire doit nous mener vers un mode de vie sobre. Nous avons tant à apprendre de nos territoires, mettons-les en avant et faisons-en des catalyseurs d’énergies positives.
Soyons HUMAIN.E.S. L’environnement est l’affaire de tous.tes. N’excluons personne. Il faut replacer l’humain.e au centre en tant que citoyen.ne acteur.rice et collaborateur.rice; arrêter de le positionner en victime inactive. L’honnêteté et le respect doivent être des valeurs humaines partagées dans la lutte pour la sauvegarde de notre planète.
Soyons INNOVANT.E.S. Cherchons constamment à améliorer l’existant en restaurant, renouvelant et transformant. Il nous faut maintenant réfléchir avant d’inventer. Reprenons les solutions du passé et améliorons-les. Arrêtons une course à la technologie de pointe, source d’illusions, qui ne repousse en rien l’inéluctable. Réorientons la recherche sur les questions environnementales et sociales.
Soyons RESPONSABLES. Désormais l’éthique sera la valeur cardinale de nos actions. Nous ne devons pas nous laisser surprendre par les conséquences de nos comportements irraisonnés et irréfléchis ; agissons en aval pour s’en prémunir. Repensons le vivant : nous ne chercherons plus à gouverner autrui, mais chacun devra apprendre à se gouverner soi-même. Dans ce monde nouveau, ni les promesses vaines, ni les agissements égoïstes n’auront leur place.
Soyons AUDACIEUX.SES. Construire le monde nouveau n’est possible que si nous osons nous affranchir des codes et des modèles existants. Que notre volonté soit un levier d’action : prenons le problème à la racine. Osons la prise de risque et l’incertitude car finalement, le plus grand risque serait de ne pas en prendre.
C’est le manifeste d’un sens. Une direction et une signification heureuses.
Audacieux.ses, soyons le cri, le cri de milliards de rages réunies. Responsables, soyons la puissance de notre devoir, finit le temps de la promesse, commence celui de l’action.
Innovants.es, soyons la communauté de ceux.celles qui prouvent et éprouvent leurs rêves, les esprits nous irriguons.
Humains.es, soyons la contre-histoire de l’effondrement – la comprendre pour la changer.
Locaux.les, soyons ceux.celles qui pensent le vivre-ensemble au prisme de l’écologie, on ne veut plus d’un mode de vie criminel sans considérer les ressources de notre propre ciel.
Collectifs.ves, soyons humbles et créons les synapses entre nous, des excuses aux moyens et des problèmes aux solutions.
Résilients.es, soyons la cristallisation de nos espérances, le monde nouveau est en chantier. Et une force : soyons en synergie pour raviver nos espoirs. On nous dit « ce n’est pas avoir une bonne santé mentale qu’être adapté à une société malade ».
On nous dit « je ne veux pas changer mes désirs mais l’ordre du monde, si l’un fane, les autres fleurissent ». On nous dit “espérer c’est transcender“ et l’espoir est le début des grandes forêts. Et s’il nous faudra composer dans un monde avec cinq degrés de plus et vingt pourcents d’espèces vivantes en moins, et s’il nous faudra apprendre à verdir les idées noires et croire dans les germes fragiles, et s’il nous faudra passer la charrue sur le champ de nos habitudes et faire marcher la pensée humaine autrement, nous le ferons parce qu’il en va de la totalité : il en va de la totalité. On ne lâchera rien. Nous sommes certains. Nous sommes inflexibles. On ne lâchera rien. Faisons ce que nous seuls pouvons refaire. Nous sommes la civilisation du feu : le feu destructif mais le feu créatif. Le point de bascule c’est maintenant. Faire front commun et être force de frappe. Mais tous et toutes ensemble. Articuler pour unifier.
Ce n’est pas le combat d’une vie, c’est le combat de la vie pour la vie. “Nous ne nous battons pas pour la nature, nous sommes la nature qui se défend”.